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Modernité

Boulonnais

Au pied de Boulogne, lorsqu’on roule entre les multiples infrastructures de ses terminaux portuaires désertés et la plateforme des aéroglisseurs anciennement à destination de Douvres, quatre éoliennes dessinent l’amorce d’une digue de trois kilomètres.

Des pêcheurs parquent leurs voitures et bicyclettes au bord d’un terrain vague avant d’aller se ficher sur l’étroit cordon de béton séparant la ville du large. Le cul sur une glacière, à l’abri derrière un mur servant de spectaculaire brise-lame dont la hauteur passe de trois à moins d’un mètre vers la pointe et son phare, ils patientent. En retrait, dans l’eau calme de la rade, on voit pointer le museau de quelques phoques venus en découdre.

Comme chez Bruno Dumont, par temps clair, on voit les côtes anglaises.

Comme chez Bruno Dumont, la disposition des bâtiments du rivage boulonnais donne une impression de clarté. Un étrange équilibre dans les choses qu’avec la désinvolture du passant nous avons tendance à prendre pour de la familiarité. Hôtels, campings, blockhaus, usines, fermes isolées, villas jouant des crépis, tourelles et faux colombages. Un lexique régional paraît s’offrir dans la lumière enveloppante du nord. Tout demande à être photographié. Mais à Ambleteuse plus qu’ailleurs encore, figée dans un siècle d’essor des loisirs entrecoupé de deux guerres, on aurait raison de passer le temps à regarder la mer, pensant que d’un printemps à l’autre il sera toujours possible de venir retrouver sur ce bord de la Manche, intactes, les images qu’il n’y a pas besoin de prendre.